Je ne résiste pas à l'envie de partager avec vous mon passage préféré. Fournier est un visite chez un architecte, cousin d'un de ses amis. Dans son cabinet, l'homme leur dit :
- Mes amis, vous abordez une profession qui serait attrayante si on pouvait l'exercer en toute indépendance, comme le font les peintres, les sculpteurs, les musiciens et se laisser conduire par son esprit créateur, au gré de son imagination. Mais hélas, il faut subir le goût du client et aussi celui de sa fidèle épouse qui va solliciter l'opinion éclairée de sa voisine ou de sa meilleure amie. Et quand le projet, revu et défiguré, est enfin réalisé, il y a le règlement des comptes qui provoque des discussions avec les Entrepreneurs et éveille aussi parfois la suspicion la plus désobligeante du client./
Notez qu'à l'époque, la femme ne peut être autre chose qu'une épouse. Ceci mis à part, ce trait d'ironie est déjà passionnant à lui seul mais la suite le rend comique. Je suis fasciné par l'humour des hommes de cette époque.
C'est ainsi qu'ayant achevé la construction des écoles de cette commune et présenté ma note d'honoraires, celle-ci a été refoulée par le Maire dans les termes suivants :
« Le conseil municipal, considérant que le montant des travaux a été réglé par l'architecte, avec une majoration de cinq pour cent sur les prévisions de son devis, le rend responsable de ce supplément de dépenses, et, en compensation, refuse le paiement des dits honoraires. »
- Je pense que vous avez vivement protesté ?
- Non, j'ai pris une toute autre attitude ; j'ai simplement adressé au Maire une lettre dont voici la copie :
« Monsieur le Maire
C'est ma faute
C'est ma faute
C'est ma très grande faute.
J'ai pleinement conscience de la gravité de ma conduite.
Vos accusations sont parfaitement justifiées et ma culpabilité est sans excuse. Déshonoré, rongé par les remords, je sens que je ne pourrai survivre à la honte et au désespoir.
Mais au moment de quitter cette terre et de rendre mon âme à Dieu, je vous confie mes dernières volonté ; Pour la cérémonie funèbre, pas de fleurs, pas de couronnes. La seule faveur que je sollicite de votre infinie bonté est de faire poser sur ma tombe une simple dalle portant cette inscription :
CI-GÎT : BOUTIER
VICTIME DU DEVIS »
- Et quelle a été la réaction du Maire ?
- Il m'a fait parvenir la réponse suivante :
« Le conseil municipal, profondément ému par votre repentir, vous accorde son indulgence. Mais, comme sanction à votre culpabilité, vous condamne à payer une tournée générale. Cette délibération a été adoptée à l'unanimité. »
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